Instrument d'agression, de dissipation des foules lors des manifestations ou outil d'autodéfense ? On s'interroge toujours sur la nature et l'utilisation des bombes lacrymogènes. La loi prévoit-elle des règles particulières pour son usage ? On vous répond ici !
Bombe lacrymogène catégorie D
🧐 Qu'est-ce que qu'une bombe lacrymogène ?
La bombe lacrymogène s’entend d’une substance chimique qui provoque principalement la sécrétion de larmes. Elle est encore appelée "bombe aérosol lacrymogène" ou "bombe au poivre". Son utilisation peut également géréner d'autres réactions désagréables et dangereuses pour le corps humain. Le terme "bombe" matérialise sa dangerosité, mais la loi soumet la bombe lacrymogène à un régime plus ou moins libéral.
🔖 Classification des bombes lacrymogènes
L'article R 311-2 du Code de la sécurité intérieure établit une classification d'armes par catégories. Elle va du régime le plus restrictif au régime le moins restrictif. Ainsi, une bombe lacrymogène qui a une contenance supérieure ou égale à 100 millilitres entre dans la catégorie D. La catégorie D correspond aux armes et munitions pouvant être acquises et détenues librement. Au dessus de cette contenance, la bombe lacrymogène tombe dans les armes de catégorie B, soumise à une législation plus rigide. En effet, pour entrer en possession d'une bombe lacrymogène catégorie B, il faut obtenir une autorisation du préfet.
⚠️ Il est à noter que le ministre de l'intérieur et le ministre chargé des douanes peuvent, par un arrêté conjoint, classer dans la catégorie B les bombes lacrymogènes indépendamment de leur contenance.
Motif légitime de port de la bombe lacrymogène
Bombe lacrymogène : quel usage la loi lui assigne-t-elle ?
En principe, la bombe lacrymogène est une arme d'autodéfense. La Cour de cassation la considère d'ailleurs comme une arme par destination (Cass. crim, 21 mai 1996 : Bull crim., n°206). A cet effet, le législateur y porte une attention particulière. Dans ce sens, le Code de la sécurité intérieure réglemente son usage aux articles R311-2 à R 311-4-1.
🔞 Acquisition, port et transport de la bombe lacrymogène
1 . Acquisition d'une bombe lacrymogène
La commercialisation de la bombe lacrymogène requiert des autorisations préfectorales. De ce fait, au sens juridique elle est considérée comme un bien "dans le commerce". Toute personne peut donc s'en procurer librement dans un établissement autorisé. Les seules conditions requises sont la majorité et une utilisation à titre de défense. Pour acquérir et détenir légitimement une bombe lacrymogène, il est donc indispensable d'avoir 18 révolus au jour de l'achat.
2. Port et transport de la bombe lacrymogène
Tandis que l'achat de la bombe lacrymogène ne pose pas de difficultés majeures, le port et le transport de cette arme sont, en revanche, restreints. A ce stade, il convient de distinguer le port d'arme du transport d'arme. En effet, le port d'arme repose dans le fait d'avoir sur soi une arme. Le transport d'arme consiste quant à lui, à la déplacer d'un lieu à un autre.
C'est l'article R 315-1 du Code de la sécurité intérieure qui interdit le port et le transport sans motif légitime d'armes classées catégorie D, dont fait partie la bombe lacrymogène. En effet, une personne ne peut, sauf motif légitime, se déplacer hors de son domicile avec une bombe lacrymogène ou la détenir sur elle sur la voie publique. Ainsi, dans le cadre d'un contrôle par exemple, les forces de l'ordre vont déterminer l'existence d'un motif légitime à partir d'une analyse circonstanciée des faits, du lieu et des éléments de contexte du port ou du transport de la bombe lacrymogène. Ce type de contrôle peut être effectué par des agents de police municipale.
La légitime défense : le motif par excellence
La légitime défense demeure le principal motif légitime de port, de transport et d'usage d'une bombe lacrymogène. Néanmoins, cet usage répond à plusieurs exigences, même dans le cadre de cette cause d'irresponsabilité pénale. Ainsi, pour que l'usage de la bombe lacrymogène soit légal, il doit remplir toutes les conditions de la légitime défense. Il s'agit notamment de :
- Une atteinte volontaire et injustifiée à sa personne et une défense pour soi-même, réciproque et concomitante à l'attaque ;
- La nécessité de la défense. L'usage de la bombe lacrymogène doit être le seul moyen pour la victime d'une agression de se défendre ;
- La proportionnalité de la défense. L'usage de la bombe lacrymogène doit être proportionné à l'attaque subie.
Pour tout savoir sur la légitime défense, consultez notre fiche pratique !
Par ailleurs, les forces de l'ordre peuvent également porter, transporter et faire usage de la bombe lacrymogène sous le couvert du commandement de l'autorité légitime, revêtant également la qualification de fait justificatif. La seule limite dans ce cas réside dans une utilisation manifestation illégale, notamment lorsqu'elle est faite en dehors des heures de travail et à des fins personnelles.
Agression à la bombe lacrymogène : quelle peine ?
Le vide juridique qui jadis, entourait la bombe lacrymogène, a fortement contribué à en faire une arme d'attaque et précisément d'agression. Son utilisation anarchique a alors posé de sérieuses préoccupations d'ordre public. Pour pallier ces difficultés, la loi a assorti de condamnations pénales tout usage de bombe lacrymogène dans le but de commettre une infraction pénale, notamment dans les cas d'agression.
En droit pénal, le port d'arme est une circonstance aggravante de peine. Cependant, dans le cadre d'un vol par exemple, la doctrine considère que le simple port d'une bombe lacrymogène ne constitue pas une circonstance aggravante : il faudrait encore que celui qui la porte l'utilise effectivement ou menace de le faire.
Lorsqu'une agression survient au cours d'une manifestation, l'article 431-10 du Code pénal prévoit une peine de trois ans de prison et 45.000 euros d'amende pour le port d'arme.
💡Hors des cas d'agression, retenez que le port ou le transport d'une bombe lacrymogène sans motif légitime est une infraction pénale vous exposant à une peine de 15 000 euros d'amende et 1 an de prison. Cette peine est doublée lorsque l'infraction est commise conjointement avec une autre personne.